Ce début d'année, deux réunions concernant les projets de parcs éoliens proches de Château-Thierry , plus la nouvelle du rejet du parc de Blesmes par arrêté préfectoral de décembre 2018.
En exergue
Les présents comptes-rendus, abordant bien sûr des caractéristiques locales, sont aussi l'occasion de rappeller bien des aspects essentiels de chaque projet éolien. Ici nous n'interviendrons pas sur les aspects locaux, hors la présentation des aspects techniques fournis pas le promoteur ; nos critiques spontanées éventuelles sur ces projets précis seront à préciser au plus tard lors de l'enquêt publique.
14 janvier 2019, Conseil municipal de Lucy-le-Bocage
La société Boralex présentait au conseil municipal (CM) les grandes lignes de son dossier du projet Marigny-Lucy. Le maire de Lucy-le-Bocage a demandé aux participants à la réunion, non membres du CM, d'être seulement observateurs. Il s'ensuit que nous n'avons pas pu poser de questions, aussi certains points présentés ci-dessous ne sont forcément tous précis.
A Lucy-le-Bocage BORALEX a bien sûr présenté la partie du projet concernant la commune, celle concernant Marigny ayant été présentée en décembre 2018 au CM de Marigny-en-Orxois.
Bornons-nous ici aux grandes lignes.
Pour Marigny/Lucy, six éoliennes de 130 m de haut (bout de pales) de 3,45 MW chacune ou 6 de 180 m de puissance individuelle 3,9 MW, trois sur chacune des communes. L'ingénieur a présenté le choix retenu pour la position des éoliennes, en ligne, proche de la limite de la commune vers Marigny.
L'aspect financier : revenus de l'ordre de 24000 €/an pour la commune, 84000 €/an pour l'EPCI (je ne sais s'il s'agit de la partie Lucy seule ou de l'ensemble).
Bien sûr, l'accident (2 blessés) arrivé lors du montage du premier mât de mesure semble avoir retardé le projet (mesures de vents) mais pas sa rédaction. Ce qui mène à un calendrier très resseré, dont voici les quelques étapes :
- fin février/mars 2019, permanences d'information pour les habitants.
- mars 2019, dépôt en préfecture.
- fin 2019 (?), fin de l'instruction et enquête publique (cf. commentaires)
- 2020-2021, construction et mise en service
Quelques mesures d'accompagnement ont été présentées. Retenons ici, en dehors de grands classiques [voierie, réfections diverses…] (je ne me souviens pas si a été cité ce jour l'enfouissement des lignes électriques et téléphones aériennes sur le centre du village) :
- …
- plantation d'arbres fruitiers dans les jardins d'habitants dont la vue depuis leur domicile serait perturbée par les éoliennes,
- un financement participatif peut-être envisagé,
- une “voie verte” reliant les centres des deux communes,
- …
Peu de remarques de la part des membres du CM. A retenir juste l'espoir de certains que les environs proches ne se peuplent pas d'autres éoliennes, afin que ce petit territoire ne se mette pas à ressembler aux environs du sud de Châlons-en-Champagne, pris comme exemple (!).
Peut-être pourra-t-on en dire plus lors des permanences de février-mars, ou lors de l'enquête publique ?
15 janvier 2019, quatrième et dernière réunion à Essômes-sur-Marne
Les participants aux précédentes réunions ayant laissé leurs coordonnées à GlobalWindPower ont été invités à la quatrième réunion, devant préciser le contenu du dossier qui est prêt à être déposé en préfecture. La cellule "tech-de-com" n'était heureusement pas présente, cf nos comptes-rendus précédents.
APPEISA et Vie&Paysages étaient représentées.
Le dépôt en préfecture est prévu dans les tous prochains mois, menant à une enquête publique vers le 4ème trimestre de l'année 2019, cf. infra.
Le projets est désormais précis :
- 5 éoliennes de 179,5 m de haut en bout de pale (nacelle à 110 m), fabrication Nordex, puissance nominale 4,5 MW. Le facteur de charge attendu (0.28, [2500 équivalent heures/an à régime nominal]}. Le choix de la hauteur des éoliennes est non seulement effectué pour augmenter le facteur de charge, mais aussi, est-il annoncé, pour permettre (théoriquement) aux buzards, volant dans ces cieux, d'occuper le terrain sans trop de danger (30 m depuis le sol jusqu'au bout des pales au point inférieur).
- l'emplacement des éoliennes est indiqué sur la carte ci-dessus (il s'agit des emplacements reportés par nous à partir d'une photo de la présentation).
- financement : régime des “appels d'offre”. Au vu des projections des prix moyens de l'électricité, théoriquement en baisse (cf. questions) GWP se propose de concourir à l'appel d'offre avec une fourchette de 50-55 €/MWh (l'actuel appel d'offre 65 €/MWh, 2019). L'ingénieur insiste sur le fait que le nucléaire (d'éventuelles nouvelles centrales) devrait alors coûter 120 €/MWh – reprise des informations distillées en particulier par l'ADEME, cf. infra. Le prix de l'appel d'offre garantit un revenu fixe pour l'éolien indsutriel, même si le marché révèle un prix inférieur ; Or la muliplication des éoliennes mène, mènera de plus en plus, lors des événements venteux à un prix du marché bas…
- étude acoustique
- ce genre d'étude comporte toujours deux aspects. Tout d'abord un relevé des niveaux sonores au niveau des habitations les plus proches, pour différents régimes de vent (saisons, directions, vitesse) ; puis, à partir des emplacements de éoliennes choisies, de leurs caractéristiques fournies par le constructeur, une modélisation permettant d'évaluer le niveau sonore aux lieux choisis avec les éoliennes en place. Le dépassement de niveau, dû aux éoliennes, au-delà des 35 dB(A) servant de référence aux installations classées mène à un bridage plus ou moins important si le dépassement est supérieur à 5 dB(A) de jour, 3 dB(A) de nuit. Certaines éoliennes seraient bridées de nuit en cas d'alerte pour respecter ces seuils à Bourbetin, La Nouette…
- il est prévu de procéder tous les ans à une vérification, in situ, de la qualité de détection des seuils menant à un bridage de certaines éoliennes, et, plus généralement, à la satisfaction de l'absence de dépassement de ces seuils.
- paysages
- des montages photo étaient installés sur les murs de la salle polyvalente (en fait il s'agissait de montages panoramiques qui n'ont pas de validité légales) et, plus intéressant, montage 3D élaborés à partir d'un logiciel SIG où étaient placés l'environnement existant (dont les éoliennes de Charly, les bois, routes, maisons…) et les éoliennes du projet, déplacement possible sur les routes ou en dehors des routes, à petite ou grande vitesse. Informatiquement c'est bien sûr assez lourd. L'avantage est bien sûr ici de voir les éoliennes tourner,
- des montages paysagers avec de éoliennes feront partie du dossier remis en préfecture. Le promoteur nous a dit avoir parcouru la vallée de la Marne, en particulier en observant les endroits qui ont servi de cadre aux peintres de "bords de Marne", cf. infra.
- ERC, éviter les nuisances, les réduire, et, sinon les compenser. C'est le nouveau nom des Mesures Compensatoires. Suit alors une liste (peut-être incomplète ici) de points envisagés, dont :
- rénovation thermique lourde de la salle polyvalente (devis divers déjà effectués), avec, en particulier, une amélioration du bilan carbone,
- voierie secondaire,
- aménagement pour l'entretien hydraulique + assainissement,
- enfouissement de lignes électriques à Bourbetin,
- mise en valeur de l'abbatiale,
- haie aux allentours de Taffournay
- chemin parcours pédestre d'Essômes vers le parcs, avec panneaux explicatifs…
- perchoirs pour rapaces pour essayer d'éloigner leur lieu de vie au maximum.
questions et remarques
- un habitant d'Essômes est intervenu pour interroger le promoteur sur le choix de la hauteur des éoliennes (180 m), très au-dessus de celles, voisines du parc de Charly (125 m) [ce point avait été abordé lors des réunions précédentes, avec un espoir de ne pas heurter (trop) le paysage]. La réponse de GlobalWindPower comporte deux aspects : le premier se trouve dans l'espoir d'un grand facteur de charge, et, donc d'un retur financier aprécaible, permetttant de concourir à l'appel d'offre avec un abaissement du prix de revente ; l'autre est un constat sur le fait que le parc de Charly, déjà bien ancien (pour des éoliennes) devra assez rapidement ou arrêter (et être démantelé) ou relancer un projet de repowering… qui obligera l'exploitant à déposer un nouveau projet (moins d'éoliennes, plus hauts et plus écartées les unes des autres [cf. la carte ci-dessus].
- deux questions d'APPEISA, rassemblées ici.
le prix de rachat. A supposer que le contrat futur (sous appel d'offre) corresponde à un prix de 55 €/MWh, que se passe-t-il lorsque les prix du marché sont supérieurs à ces 55 €/MWh. Après une hésitation GWP indique que la différence de prix (prix du marché - prix de rachat) sera empochée par l'entreprise “agrégateur” (chargée de la gestion de l'implémentation des ressources renouvelables, intermittentes ou non, pour participer à l'équilibre consommation-production). Par ailleurs, c'est l'occasion, pour GWP, d'affirmer que l'on ne peut plus (et que l'on ne doit plus) accuser les nouvelles installations éoliennes d'être ruineuses pour la nation. [note du présent rédacteur : les 135 milliards d'€ dont on parle au titre de la CSPE correspondent à la tolalité des subventions accordées aux EnR électriques pour les contrats signés avant fin 2016, subventions à percevoir jusqu'en 2046, et encore en phase de croissance.
C'est vrai, à première vue… mais c'est faux quant au fond… car le prix de rachat est celui en sortie d'éolienne et c'est toute la gestion de l'intermittence et de la nécessité de ressources pilotables, sûres et efficaces qui sont absolument nécessaires pendant encore des décennies (jusqu'à ce que l'on sache mettre de l'électricité en conserve, pour assurer la continuité de la production d'électricité pour satisfaire aux besoins).
Vient se greffer ici le second point. Il est intéressant de citer une étude allemande (économistes et énergéticiens) sur le prix de l'électricité. Le coût de construction du nouveau nucléaire est estimé atteindre environ 2500 €/kW – à comparer aux 1500 €/kW éolien, pour des durées de vie respectives de 60 contre 20 ans. Le prix en sortie de centrale atteint 99 €/MWh, si le facteur de charge (en fait, plutôt, si le facteur d'utilisation) est de l'ordre de grandeur de 57 %… un fonctionnement en base (95 %) fournit alors un électricité avec un prix de revient autour de 65 €/MWh. La conclusion est alors limpide : après la disparition des centrales à fioul, et, à terme à gaz, l'équiilibre de l'éolien, du solaire photovoltaïque, qui s'effectuerait à l'aide des centrales nucléaires nouvelles (c'est un choix qui se développe au niveau mondial), il est inutile et malvenu de comparer ces deux coûts… c'est l'ensemble dont il faut parler.
En étant un peu provocateur, on pourrait dire que la différence entre 99 et 65 € serait à attribuer à l'éolien et au photovoltaïque. Sans compter sur le coût d'intégration du MWh éolien onshore dans le réseau, évalué à 13 €/MWh dans la même étude.
Il n'est pas inutile d'insister sur un autre trait… Le 10 janvier 2019, le vent en France, et surtout en Allemagne, était particulièrement faible. Le réseau interconnecté européen est passé proche d'un blackout. Notre voisin d'outre-Rhin, avec ses 60 GW éoliens ne produisait plus assez pour satisfaire la demande. Nos centrales nucléaires travaillaient à plein (elles ont un très grand rôle dans l'équilibre continental et certaines son en grand carénage). Augmenter la puissance installée en éolien (pour l'aspect hivernal) et diminuer les ressources pilotables (passer à 50 % d'électricité nucléaire, sans autre apport majeur) est source de risque d'événements fort gênants. C'est d'autant plus vrai que sur une zone donnée (qui peut atteindre une bonne partie de l'Europe) les variations de vent importantes peuvent mener en quelques heures à des variations de production électrique très importante, rendant nécessaire l'existence de ressource pilotables, puissantes, sûres, et extrêmement souples… sources restant éventuellement inemployées une partie du temps.
En ce sens là, significatif, l'éolien neuf, se développant à marche forcée, pose bien des problèmes, au seul titre des aspects financiers.
- remarques concernant les nuisances sonores. Depuis plusieurs années les éoliennes industrielles sont gérées dans le cadre des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Les seuils de déclenchement des seuils de dépassement de niveaux sonores est alors passé de 30 dB(A) à 35 dB(A). Ce qui est une différence très importante. Il en plus nécesaire de bien insister sur le fait que les mesures de niveaux sonores sont effectuées en extérieur, négligeant totalement les réponses sonores des bâtiments et surtout le fait que les fenêtres ouvertes (du printemps à l'automne) peuvent amplifier la pénétration des ondes sonores issues des éoliennes vis à vis du fond sonore ambient, bien moins directionnel.
Récemment, l'Académie Nationale de Médecine a édité un rapport sur ces points, demandant un retour vers le seuil de déclenchement à 30 dB(A) à l'extérieur et 25 dB(A) à l'intérieur des habitations. C'est bien sûr un point essentiel pour les habitations proches de ces machines gigantesques. Par exemple le hameau de Bourbetin se trouverait à 760m de l'éolienne la plus proche… alors que des témoins entendaient déjà, par moments, les éoliennes de Charly-sur-Marne.
- dernier point abordé : la tenue de l'enquête publique. La région Hauts de France sert désormais de terrain d'expérimentation à l'enquête publique numérique, dématérialisée. GWP a répondu que EP s'effectuerait selon le mode en cours jusqu'ici.